Les taux immobiliers en 2018 n’ont jamais été aussi bas, c’est un fait. C’est la première fois dans l’histoire économique moderne que les taux sont aussi bas et sur une aussi longue période. Le taux d’intérêt moyen des crédits immobiliers, tous marchés confondus est de 1,46% en juin, à titre de comparaison, ce même taux était à 5,5% en janvier 2001.

Pourquoi ces taux

Quelle que soit la zone économique, que l’on parle de l’Europe, des Etats-Unis, de l’Asie, les taux directeurs des banques centrales sont proches de zéro. Les taux directeurs sont, en simplifiant, les taux d’intérêt que fixe la banque centrale d’un pays, d’une union, ou d’une confédération, permettant de réguler l’économie du pays et, entre autres, l’octroi de crédit et leurs taux d’intérêt.

Euribor

Taux immobilier - ifi

Si on s’intéresse à l’Europe, et aux taux immobilier, le nom d’Euribor va fatalement apparaitre assez rapidement. Euribor est en effet, le nom du taux auquel les différentes banques européennes se prêtent de l’argent entre elles. Ce taux est un taux à court terme, et sans expliciter les causes, il explique les taux immobiliers actuels. En effet, ce taux est négatif ! Ce taux est négatif depuis 2014, suite à une volonté de la Banque Centrale Européenne (BCE).

Un Euribor négatif signifie, que, lorsque les banques européennes se prêtent de l’argent à courts termes entre elles, elles perdent de l’argent au lieu d’en gagner. Vous devez déjà entrapercevoir, pourquoi ceci explique en partie les taux d’intérêt immobiliers si bas. Effectivement, les banques préfèrent prêter de l’argent, même à des taux très faibles, plutôt que de prêter des fonds à perte ! Elles ont tout intérêt donc à consentir des prêts aux entreprises et aux particuliers (notamment des prêts immobiliers), plutôt que de prêter de l’argent aux autres banques.

Pourquoi la BCE a placé l’Euribor si bas

La BCE voit l’intérêt économique de l’Europe avec cette décision. En effet, un Euribor si bas présente bien des avantages pour l’économie européenne. L’esprit entrepreneurial est boosté par des taux d’intérêts comme ceux que nous connaissons actuellement, le prix des crédits étant ce qu’il est, emprunter pour constituer son entreprise est bien moins cher qu’il y a quelques années. Ceci profite bien évidemment à l’économie de multiples façons.

Il en est de même concernant les investissements des entreprises qui peuvent elles aussi souscrire à des crédits bien moins onéreux. Les crédits revenant bien moins cher, les particuliers font des économies sur leur achat de biens immobiliers, ce qui relance pour une part la consommation des ménages.

Enfin cette manœuvre abaisse quelque peu la valeur de l’Euro sur le marché, ce qui permet de réaliser de plus fortes exportations.

La manipulation de l’Euribor par la BCE est donc une stratégie économique présentant de nombreux avantages.

Les taux peuvent-ils encore baisser

Répondons tout de suite, c’est très peu probable. Les taux directeurs sont quasiment nuls comme nous l’avons vu, et il ne sert donc à rien d’attendre une potentielle baisse de ces derniers avant d’envisager un achat immobilier. Les taux sont tellement bas que les banques sont obligées de fermer certaines de leurs agences, et de revoir une partie de leur stratégie économique afin de conserver un certain seuil de rentabilité. C’est par exemple l’une des raisons qui fait que nous voyons au fil des ans, les agences bancaires lancer de nouveaux produits. Elles se diversifient et tentent de nouvelles choses afin de contrebalancer les pertes qu’elles connaissent avec les prêts immobiliers.

Car ces banques n’ont pas le choix, elles doivent rester concurrentielles, et les taux directeurs étant ce qu’ils sont, nous assistons à une véritable guerre basée sur les taux immobiliers. C’est un peu à qui proposera les plus bas. Ceci profite bien entendu aux emprunteurs, qui, s’ils ont le profil recherché par les banques, se voient offrir un large choix d’entités à qui emprunter de l’argent très peu cher.

Et remonter

S’il est plus ou moins couramment admis que les taux ne baisseront plus, qu’ils ont atteints un certain plafond, se pourrait-il qu’ils remontent subitement ? C’est également peu crédible. Si les taux directeurs venaient à remonter très rapidement, alors les banques se trouveraient dans la situation où elles ont prêté de l’argent à moyens ou longs termes à des taux défiant toute concurrence et qu’elles doivent en acheter à des taux bien supérieurs à ceux des remboursements de crédit. Certaines ne pourraient pas y survivre, et d’autres se retrouveraient dans des situations financières désastreuses.

Une brusque remontée « naturelle » des taux directeurs, et donc par corollaire, des taux immobiliers n’est donc pas envisageable. Il faudrait un événement de grande ampleur et hors du commun pour que cela soit possible, comme par exemple une reprise exceptionnelle et très forte de la croissance, ou bien un krach financier.

Cependant, les analyses ne sont pas annuelles, les taux d’intérêts sont scrutés en temps réel, et si une forte augmentation de ces taux n’est, comme nous l’avons vu, pas vraiment possible, il s’avère que depuis quelques mois, ils sont en légère hausse. Cela pourrait être le signe d’une certaine reprise économique, ou que les banques ne peuvent plus tenir des taux aussi bas.

La recherche du risque zéro

Une autre explication parfois donnée aux taux si bas, est que les banques recherchent la prise de risque la moins élevée possible. En effet, consentir un prêt, à un particulier, ou à une entreprise est un pari sur le fait qu’il sera remboursé ou non.

Les différentes crises économiques qui se sont succédées ont obligé les banques à revoir le risque qu’elle pouvait se permettre de prendre en acceptant un prêt. Le nombre d’emprunteurs éligibles aux nouvelles conditions de prêt ayant drastiquement diminué, les banques se retrouveraient dans l’obligation de proposer des produits très attractifs. Si cette explication est parfois avancée, elle reste bien moins probable et réelle que celle qui explique la baisse constante des taux immobiliers pas des taux directeurs, partout dans le monde, proches de zéro. Ou même en dessous de zéro pour la zone Europe.

Taux immobilier et durée d’emprunt

Taux immobilier - location

La situation des particuliers voulant accéder à la propriété à fait que les durées d’emprunt, le nombre d’années durant lequel il faudra rembourser un crédit immobilier s’est allongé. On parle actuellement, en 2018, d’une durée moyenne de prêt comprise entre 20 et 25 ans.

Pourquoi ces durées s’allongent

En France, l’emprunteur est protégé par une loi interdisant que le montant de ses remboursements de crédit dépasse les 33% de ses revenus. On parle de taux d’endettement maximum. En augmentant la durée de remboursement du prêt, on diminue ainsi les mensualités du dit crédit, et on peut également, par ce truchement, augmenter sa capacité d’emprunt tout en restant sous ce seuil des 33%.

Actuellement les banques proposent même des emprunts remboursables sur 30 ans !

Pour prendre un cas pratique, si un particulier, proche du seuil d’endettement maximum de 33%, pour un emprunt de 200 000€ sur une période de 15 ans, choisit d’augmenter la durée de son crédit, cela influencera comme suit (aux taux actuels) :

  • En augmentant la durée de 15 à 20 ans, les mensualités baisseront de 18%
  • En passant de 20 à 25 ans, elles baisseront à nouveau de 11%
  • En choisissant directement une période de 25 ans, celles-ci seront réduites de 27%

On comprend donc facilement pourquoi les durées s’allongent, elles permettent de bénéficier plus facilement d’un prêt, et apportent aussi l’avantage de pouvoir emprunter plus, donc d’acquérir un bien plus cher.

Dépasser 25 ans

Cependant, à ce constat, il faut apporter une petite mise en garde. Il est déconseillé, si cela est possible de dépasser une durée de remboursement de 25 ans (voir 20 dans certains cas). La baisse des remboursements sera négligeable, les capacités d’emprunt ne seront pas énormément plus importantes, et plus important que tout, la banque se méfiera bien plus.

Actuellement, une durée standard d’emprunt, pour les banques est de 15 à 20 ans. Passé ce standard, les banques seront bien plus regardantes, et vos chances d’accéder au crédit diminueront tout autant. Il faut bien comprendre que si la banque prête plus longtemps, elle risque un non remboursement sur une durée elle aussi plus longue.

Si l’augmentation de la durée de remboursement, sur une durée de plus de 20/25 ans, est envisagée pour des motifs financiers, il y a peu de chance qu’actuellement la banque consente à prêter son argent, car elle considérera cet emprunt comme trop risqué.

Une évolution stupéfiante

Les taux peuvent changer d’un pays à l’autre, bien entendu, et même d’une région à l’autre. Ils peuvent être aussi variables selon votre situation ou la durée durant laquelle vous voulez rembourser cet emprunt. Quoi qu’il en soit, une tendance générale arrive tout de même à se dessiner.

Les taux sont en chute libre ! En effet, les taux actuels sont à leur niveau le plus bas jamais atteint depuis 70 ans. Comme nous l’avons vu, cela est en très grande partie dû aux taux directeurs, abaissés un maximum pour essayer de pallier aux différentes crises financières, mais aussi au taux des OAT, les fameuses Obligations d’Etat), remboursables sur 10 ans, qui ont un impact direct sur les taux d’emprunt. Tout ceci conduisant à des taux d’emprunt au plus bas depuis les années 40.

Si cette évolution est liée à ces facteurs, ce n’est pas une explication des causes de la baisse de ces facteurs. C’est la croissance, en panne depuis plusieurs années, et les crises économiques qui ont intimées l’obligation aux banques centrales de fixer des taux directeurs extrêmement bas, voir négatifs pour l’Europe.

On pourrait penser en toute bonne foi, que des taux aussi bas sont particulièrement bénéfiques pour les particuliers, mais dans la réalité des choses ce n’est pas aussi simple.

En effet, la baisse quasi ininterrompue des taux immobiliers à conduit à plusieurs effets pervers des marchés. Par exemple, le prix des logements n’a jamais été aussi haut, ils explosent dans toutes les grandes villes, ce qui est finalement assez simple à comprendre quand on le sait, les taux d’intérêts étant très bas, les vendeurs peuvent se permettre d’augmenter leurs prix.

Autre conséquence, plus difficile à appréhender, le remboursement par les états. Il faut bien comprendre qu’un taux directeur négatif comme celui en cours en Europe veut dire que, si je vous prête 100 € sur une période d’un an, je suis d’accord, pour qu’à échéance, vous ne me remboursiez que 99 €. Les états perdent donc de l’argent afin de maintenir une économie la plus stable possible. Mais cette situation n’est pas tenable sur le long terme et les états doivent donc trouver un moyen de se rembourser.

Et ce moyen est déjà en application depuis pas mal de temps maintenant, baisse des taux de rémunération des comptes épargne, augmentation de certains impôts. Les épargnants perdent une partie de la rentabilité de leur épargne au profit d’un maintien des taux d’emprunt très bas.

En 2012, le FMI (Fond Monétaire International) préconisait même une ponction des sommes contenues sur les comptes épargnes à hauteur de 10%. Si cela n’a pas eu lieu, une certaine érosion de l’épargne est à prévoir, car si les taux rémunérateurs continus leur baisse, ils pourraient eux aussi devenir négatifs.

Si cela devait se produire, ce que de nombreux économistes tiennent pour acquis, alors, les épargnants retireront leurs actifs des banques ce qui en mettra beaucoup en faillite, ceci accélérant encore plus le processus.

Que les taux soient fluctuants, un peu, et sur une courte durée, c’est normal, il y a tellement de facteurs. Mais que les taux soient stables à un niveau aussi bas, ne pourra pas conduire durablement à une stabilité économique, les répercutions étant trop nombreuses.

Pour conclure, nous pouvons dire que les taux immobiliers en 2018 sont au plus bas, et que si ce constat peut paraitre constituer une bonne chose, il n’en est dans les faits rien. Ces taux ne reflètent pas, comme ils le devraient, la réelle économie des pays, ils sont artificiels et servent à maintenir la tête hors de l’eau suite aux différentes crises économiques.