Les frais de succession peuvent grimper de façon vertigineuse si le défunt n’avait pas pris certaines dispositions de son vivant. Le barème est en effet très progressif et parfois, le fisc récupère une part importante des actifs laissés aux héritiers. Seul moyen de leur éviter cette déconvenue, c’est d’agir tant qu’il est encore temps.
La succession : comment ça fonctionne ?
La procédure de succession commence par l’inventaire des biens laissés par le défunt et le remboursement des dettes de celui-ci. En effet, avant que toute somme ou/et tout bien soient transférés aux héritiers, il faut que toutes les dettes du défunt soient réglées. Cela peut inclure les frais funéraires, les frais de notaire et éventuellement les dépenses liées à la procédure de succession.
La deuxième étape consiste à rechercher tous les ayants droits potentiels à l’héritage. Il faut savoir que leur nombre ainsi que leur lien de parenté avec la personne décédée pèsent dans le calcul des frais de succession. Théoriquement, la gestion de la succession peut être assurée par les héritiers eux-mêmes ou par un mandataire désigné à titre posthume. Ceci dit, elle est généralement assurée par un notaire.
N’oubliez pas qu’en France, la succession est un acte encadré par la loi. Vous ne pouvez donc pas léguer la totalité de votre fortune comme vous l’entendez. Il y a des règles à respecter qui visent principalement à protéger les descendants du défunt. Donc, contrairement à ce que beaucoup croient, vous ne pouvez pas déshériter vos enfants. Les enfants du défunt disposent d’une part incompressible dans la succession. Cette part est appelée « réserves » et les enfants de la personne décédée sont ce qu’on appelle « héritiers réservataires ».
Cette part de la succession que l’on appelle réserve ne peut être attribuée qu’aux enfants du défunt. Il est donc impossible de la céder à une autre personne, même par testament. Cette réserve varie en fonction du nombre d’enfants. En pratique, elle équivaut à la moitié de l’héritage si le défunt n’a qu’un seul enfant, aux deux-tiers s’il a deux enfants et aux trois-quarts s’il y a trois enfants ou plus. Ensuite, elle doit être partagée à part égale entre les enfants, même si ces derniers sont issus de mariages différents.
Si le défunt n’a pas laissé d’enfant, c’est son conjoint marié ou son partenaire de pacs qui sera l’héritier réservataire. Il ou elle aura alors la moitié de la réserve si les deux parents du défunt sont encore vivants et trois-quarts si un des deux parents est toujours en vie. Bien évidemment, le concubin ou la concubine n’auront rien légalement.
Frais de succession : comment les calculer ?
Les frais de succession dépendant de la valeur estimée du patrimoine certes, mais aussi du montant des abattements appliqués. Sachez que ce montant varie selon le degré de parenté de l’héritier avec le défunt. Ainsi, l’époux ou l’épouse ou encore le partenaire d’un pacs est totalement exonéré de frais de succession. L’abattement se chiffrera à 100 000 euros par tête pour les enfants du défunt, 15 932 euros par personnes pour les frères ou/et sœurs. Il sera de 7967 euros par tête pour les neveux et/ou nièces et de 1594 euros par personne pour les petits-enfants et les arrière-petits-enfants.
Il est bon de savoir que les héritiers qui souffrent d’un handicap auront droit à un abattement supplémentaire de 159 325 euros par personne.
Après déduction de l’abattement s’applique le barème d’imposition. Ici, il faut prendre en compte la part d’héritage de chacun et son lien de parenté avec le défunt. Donc, pour les ascendants et les descendants, le taux d’imposition peut aller de 5% au dessous de 8078 euros à 45% pour les héritages de plus de 1 805 677 euros. Pour les frères et sœurs, le barème d’imposition varie de 35 % pour une part taxable de moins de 24 430 euros à 45 % si celle-ci dépasse le seuil de 24 430 euros.
Sachez que quelle que soit la somme après abattement, le taux d’imposition monte à 55 % pour les parents jusqu’au quatrième degré et à 60% pour les parents de plus de 4e degré.
Conseils pour réduire les frais de succession
Donc comme vous l’aurez compris, les frais de succession peuvent s’alourdir pour vos héritiers. C’est pour cela qu’il est toujours préférable de prendre s’y préparer dès qu’on s’approche de la cinquantaine. C’est d’autant plus important si vous vous êtes mariés ou que vous avez des enfants d’un second et/ou troisième lit.
Faire une donation d’un bien immobilier en démembrement de propriété
Pour épargner les héritiers, vous pouvez envisager la donation dès votre vivant. Si vous avez des biens immobiliers, vous pouvez opter pour le démembrement de propriété. Cette solution a l’avantage de vous permettre de transmettre un bien à vos héritiers tout en continuant de l’occuper ou de le louer, en plus de bénéficier d’une fiscalité allégée. Vos héritiers, quant à eux, deviendront alors nues-propriétaires du bien. Cela veut dire qu’ils sont copropriétaires du bien en question sans bénéficier pour autant du droit de l’occuper.
Avec ce système, les frais de succession à payer ne sont plus calculés selon le barème classique. Ils sont calculés à partir de la valeur de la nue-propriété que vous avez cédée. Or, cette valeur dépend de votre âge. Autrement dit :
- Si vous avez moins de 51 ans au moment de l’acte, la valeur de la nue-propriété sera estimée à 40 % du prix de votre bien.
- Si vous avez moins de 61 ans au moment de la donation, la valeur de la nue-propriété sera estimée à 50 % du prix de votre bien.
- Si vous avez moins de 71 ans au moment de l’acte, la valeur de la nue-propriété s’élèvera à 60 % du prix de votre bien.
- Si vous avez moins de 81 ans au moment de l’acte, la valeur de la propriété s’élèvera à 70 % du prix de votre bien.
Vous l’aurez compris, plutôt vous cédez la nue-propriété, plus le droit de donation à payer sera réduit. Dans certains cas, l’impôt à payer peut être annulé et vos héritiers peuvent récupérer l’usufruit de la propriété sans avoir à verser de l’argent au moment de votre décès.
Il faut savoir aussi que cette solution ne concerne pas que les biens immobiliers. Il est également possible de faire des donations familiales d’argent. Mais attention, elles sont réservées uniquement à vos descendants (enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants). Tous les 15 ans, vous pouvez faire à chacun une donation d’argent jusqu’à 31 685 euros net d’impôts. Et vous n’êtes même pas obligés de passer devant un notaire. L’acte peut se faire sous seing privé. Mais attention, vous devez quand même le déclarer à l’administration fiscale.
Faire des présents d’usage
Il est également possible de réduire les frais de succession en faisant ce qu’on appelle « présents d’usage » ou « dons manuels ». Il s’agit d’un cadeau lié à un événement particulier comme Noël, mariage, anniversaire, etc. La valeur du bien ou de l’argent offerte doit rester dans la limite du raisonnable, même si aucun texte légal n’encadre pas cette forme de donation. Selon les notaires, la valeur de ce cadeau ne doit pas excéder les 2 % de votre fortune.
Comme cadeau, vous pouvez offrir une certaine somme d’argent, un chèque, un bijou, une voiture etc. Et ces dons sont exonérés d’impôt tant que le montant ne dépasse pas le taux mentionné ci-haut, d’où son intérêt si on veut réduire les frais de succession.
Faire des dons d’argent
Si vous décidez de faire des dons exceptionnels d’argent en espèces, chèque ou encore virement à vos héritiers, vous ne paierez pas d’impôt si le montant du don ne dépasse pas de 31 865 euros et que vous remplissez les conditions suivantes :
- Vous êtes âgé de moins de 80 ans
- Le bénéficiaire du don est majeur, sinon un mineur émancipé.
Si vous êtes âgé de plus de 65 ans et que vous souhaitez faire un don manuel à l’un de vos enfants, nièces ou neveux, vous ne pouvez pas bénéficier de l’exonération de taxe sur le don de 31865 euros. En revanche, vous pourrez encore en bénéficier si vous effectuez ce don à vos petits-enfants, petits-neveux/nièces et ce, jusqu’à l’âge de 80 ans.
Après 80 ans, vous pouvez toujours faire des dons manuels mais en revanche, vous ne pouvez pas bénéficier d’un abattement.
L’abattement sur le don d’argent dépend aussi du lien de parenté entre vous et le bénéficiaire. Par exemple, vous êtes en droit de faire un don de 100 000 euros à chacun de vos enfants sans avoir à payer des droits. Après, un deuxième abattement de 31 865 euros s’appliquera tous les 15 ans et ceci peut être cumulé avec les autres abattements familiaux.
Sachez que les sommes que vous aurez avancées en tant que donataire ne s’ajoutent pas au montant de l’héritage.
Faire la tontine sur un bien immobilier
Cette solution porte le nom du banquier italien qui l’a inventé, Lorenzo Tonti. Il s’agit en fait d’une clause dite d’accroissement. Il faut dire que cette technique matrimoniale n’est pas bien connue, mais elle n’en est pas moins avantageuse si elle est appliquée à l’immobilier.
La tontine vous permet en effet d’acheter un bien immobilier à plusieurs. Il suffit d’introduire la clause de la tontine dans le contrat de vente, stipulant que la propriété du logement reviendra au co-acheteur survivant. Ce dernier sera alors reconnu comme le seul propriétaire du bien et ne paiera pas de frais de succession. En revanche, il sera obligé de s’acquitter des droits de mutation à titre.
Vendre en viager un bien immobilier
Vous pouvez vendre un bien immobilier à vos enfants ou autres membres de votre famille pour ne pas payer de droit de succession. Mais attention, cette solution doit être manipulée avec précaution, notamment au niveau de la rente viagère. Le montant de cette dernière doit être raisonnable et en adéquation avec la valeur du bien. Autrement, le fisc risque d’y voir une donation cachée et vous sanctionner par un redressement fiscal.
Souscrire à une assurance vie
Le contrat d’assurance vie est l’une des solutions les plus intéressantes pour qui veut réduire les frais de sa succession. Les avantages sont multiples. D’un, ce placement n’est pas pris en compte dans la comptabilisation de votre patrimoine. De deux, vous êtes libre de choisir les bénéficiaires, même ceux qui sont en dehors de votre cercle familial. De trois, chacun des bénéficiaires choisis bénéficie d’un abattement de 152 500 euros.
SCI
Les sociétés civiles immobilières constituent une alternative intéressante pour échapper aux droits de succession. En tant que propriétaire d’un bien, vous pouvez intégrer les légataires comme associés de votre société. Les statuts de votre SCI doivent tout de même comporter une clause qui autorise le don des parts entre les associés. De cette manière, le régime de la donation pourra s’appliquer, ainsi que les abattements fiscaux qui lui sont propres et qui sont renouvelables tous les 15 ans.
Cet avantage peut être cumulé avec la réduction de frais de donation accordée en fonction de votre âge.
Le Pacte Dutreil
Si vous souhaitez transmettre votre entreprise familiale à vos héritiers, cette solution vous permet de profiter d’une exonération de droits de mutation de ¾ de la valeur de celle-ci. Les titres doivent tout de même faire l’objet d’un engagement collectif de conservation pour une durée de deux ans à partir de la date de signature chez le notaire. Si la société est cotée, cet engagement portera sur au moins 20 % des titres. Pour une société non cotée, il concernera 34% des titres.
Cet engagement doit être fait dans les six mois qui suivent le décès du propriétaire de la société. Pour une entreprise individuelle, les légataires s’engagent à conserver l’entreprise pendant quatre ans au minium et continuer l’activité pendant trois ans à partir de la date de transmission.
A noter qu’au-delà des avantages fiscaux qu’ils offrent, « les pactes Dutreil permettent d’assurer la pérennité des entreprises familiales… » selon les explications du Desbuquois, un avocat de chez Fidal.
Conclusion
Comme vous l’avez certainement remarqué, si la transmission du patrimoine est effectuée de votre vivant, vous pouvez payer les frais de donation à la place des bénéficiaires. Cette solution est particulièrement avantageuse lorsque vous souhaitez léguer une partie de vos biens à une personne avec qui vous n’avez pas de lien familial ou à vos nièces/neveux, tantes/oncles.